Le juge du fond fixe un délai de 4 ans pour payer le capital, mais sans déterminer le montant des versements mensuels, laissant ainsi le débiteur s’organiser librement. La Cour de cassation intervient.
La décision
Le divorce de Monsieur B et Madame L, est prononcé par jugement de mars 2019.
Madame fait grief à l’arrêt – CA PARIS 15 juin 2021 – de condamner son ex-époux à lui payer une somme de 160 000 euros à titre de prestation compensatoire dont il pourra s’acquitter par versements mensuels sur une durée maximum de 4 ans, alors « que le juge qui autorise le débiteur d’une prestation compensatoire à s’acquitter de celle-ci par des versements périodiques dans la limite de huit années doit fixer tant la périodicité que le montant desdits versements qu’en autorisant M. [L] à s’acquitter du montant total de la prestation compensatoire par des versements mensuels sur une durée maximum de quatre ans, sans fixer le montant minimum desdits versements mensuels, la cour d’appel a méconnu l’étendue de ses pouvoirs et violé l’article 275 du code civil. »
La Cour de cassation – Civ. 1 n°21-22951 du 1er juin 2023 – lui donne raison :
« … En statuant ainsi, sans fixer le montant des versements mensuels, la cour d’appel a méconnu l’étendue de ses pouvoirs et violé le texte susvisé.
… »
Pour consulter la décision :
Décryptage
Lorsque l’époux débiteur n’est pas en mesure de s’acquitter de la prestation compensatoire en capital, le juge peut décider d’étaler le paiement sur une période de 8 ans maximum – art 275 C. civ.
Le débiteur peut se libérer à tout moment du solde du capital indexé.
En l’espèce, le juge avait fixé une durée de 4 ans pour payer, mais sans imposer de minimum aux versements périodiques.
Est-ce possible ? C’est la question qui était posée.
La Cour suprême répond au-delà de la question en affirmant qu’il appartient au juge, non pas seulement de fixer un minimum aux versements mensuels, mais de fixer leur montant.
Aucun pouvoir de décision n’est ainsi laissé au débiteur. Nous ne pouvons que nous réjouir de cette solution qui a le mérite d’éviter des discussions et un contentieux supplémentaire sur les modalités de paiement.
La seule marge de manœuvre qu’il reste au débiteur est la faculté de procéder à un remboursement anticipé du solde restant dû, éteignant ainsi purement et simplement la dette.
Les avocats devront veiller à la rédaction de leurs conclusions dans les divorces contentieux et pourront également s’inspirer de cet arrêt dans les conventions de divorce par consentement mutuel. Bien que la liberté laissée aux parties dans les divorces amiables soit supérieure à celle du juge, il semble toujours préférable d’encadrer au maximum les modalités de versement de la prestation compensatoire pour éviter tout contentieux ultérieur.